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J'étais au stade de France - Bondy Blog
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Nordine était avec son fils au Stade de France hier soir. Voici le récit de leur soirée.
J’étais au stade de France. Assis avec le fiston à mes côtés, derrière le but de Lloris, au milieu des supporters des Bleus. Comme d’habitude, je savourais ce moment de convivialité, de plaisir partagé avec des milliers d’inconnus, petits et grands, des gens simples, venus vibrer à chaque geste de Pogba, à chaque accélération de Griezmann, à chaque tacle de Varane.
Pour moi, l’intérêt de cette rencontre était le retour programmé de Ben Arfa. Je voulais revoir ce magicien qui je l’espère, formera un duo un jour, avec Fekir l’autre gaucher. L’avenir des bleus, c’est le pied gauche! Dans notre sac à dos, notre victuaille attendait patiemment la mi-temps pour se faire dévorer. Seule ombre au tableau, l’absence de wifi et les difficultés pour avoir du réseau. Ce n’est pas la première fois que ce problème m’exaspère. Je ne comprends pas comment une telle enceinte, avec des événements aussi importants, peut se passer d’une bonne connexion.
Soudain, nous entendons une détonation sur le flan gauche des tribunes, à l’extérieur, une deuxième et une troisième quelques minutes plus tard. Les habitués des stades ne quittent pas la pelouse des yeux. Une pelouse indigne d’une telle affiche par ailleurs. Les pétards font partie du folklore. On ne prête guerre attention à ces deux explosions. Oui, guerre ! Le match est bien lancé, c’est du tableau noir, la routine pour les joueurs. Ils font le job, le minimum syndical. D’autres enjeux les attendent cette saison. Les matches internationaux du mois de novembre sont une corvée. C’est bientôt le moment de mettre le nez dans le sac à dos. Le stade retient son souffle, Martial met en retrait et Giroud pousse le cuir dans les filets. L’ouverture du score correspond à celles des buvettes du stade.
C’est aussi le moment où me parvient une folle rumeur de fusillades à Paris. Pas de réseau, pas de vérification. Le match reprend, mon fils reçoit, par miracle un SMS. «Fusillades à Paris». Tout s’accélère, je sors des tribunes pour gratter une ou deux barres de 3G. Les SMS pleuvent, les alertes aussi. Les pétards sont en réalité des kamikazes, le Bataclan est un drame. Les agents de sécurité quadrillent les sorties du stade. Il reste 20 minutes avant la fin du match.
Je récupère le fiston et nous nous dirigeons vers le RER D. L’accès au RER B est bloqué. Sur le chemin, on entend la ferveur du public suite au 2ème but des bleus. Sur le quai, les infos tombent, les commentaires et les chiffres sont tragiques. L’ambiance dans le RER est à couper au couteau. Les attentats nous plongent tous dans l’obscurité, dans l’effroi, dans le doute, mais provoque une réaction instantanée de survie, un sursaut républicain et l’obligation de lutter contre l’instinct de mort par celui de la vie. Je parle avec le fiston pour lui faire prendre conscience de la réalité de cette situation, pour l’aider à surmonter la peur et l’angoisse. Malgré tout, la vie continue. L’intelligence doit reprendre ses droits. Le progrès, la liberté, l’égalité, la solidarité sont notre horizon.
Dans le RER, les passagers se parlent, certains donnent des infos au public venu du stade de France. J’ai expliqué au fiston que les jours à venir seront difficiles. L’émotion et les réactions abjectes à coups de formules dévitaliseront le débat, créeront la confusion, enfermeront les consciences dans une injonction suspicieuse et stigmatisante. Qu’il faudra se battre contre cette machine de décervelage massif qu’est la dictature de l’émotion, l’explication par le bouc émissaire, les amalgames lapidaires. En janvier dernier, la France s’était vite retrouvée dans la posture de l’après 11 sept 2001. Deux chemins étaient proposés, celui du bien et l’autre, celui du mal. Être ou ne pas être Charlie signifiait «avec nous ou contre nous». Cela s’appelle la dictature de la pensée, le piège de Samuel Huntington. Nous n’éviterons pas le replay. Cette fois, en mode accéléré. J’ai expliqué au fiston qu’il ne faut montrer aucun signe de faiblesse, même si la peur est un sentiment naturelle. Qu’il faut continuer d’aimer la vie, la liberté, la famille, l’équipe de France et le couscous de Mamie Hajja.
Qu’il faut répondre par davantage de démocratie à ceux qui souhaitent l’affaiblir. Que cette violence risque de s’installer, sans doute faudra apprendre à l’apprivoiser. La peur n’interdit pas l’engagement, elle peut provoquer un sursaut, une mobilisation citoyenne, une prise de conscience politique. C’est une épreuve pour notre capacité à vivre ensemble. Dans le RER, la fatigue et l’émotion reprennent le dessus. Une femme fond en larmes après un bref coup d’œil sur son smart. Les avis de recherches postés avec les photos me prennent à la gorge.
L’impuissance prend le dessus. Nous sommes rentrés après minuit. Le fiston m’a annoncé la décision des autorités de fermer les établissements scolaires. J’ai acquiescé, même si je trouve cette décision inopportune. On ne recule pas, on reste debout. Tout doit rester ouvert au service du vivre ensemble et du destin commun. J’ai demandé au fiston de réserver nos billets pour les prochains rendez-vous de l’équipe de France. Au petit matin, je me suis rendu compte, en voyant certaines photos des victimes, que la jeunesse a payé un lourd tribu ce 13 novembre 2015, parmi les 127 morts et 192 blessés à Paris et à St.Denis.
Nordine Nabili

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