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« Street art et féminisme », quand la rue fait vivre la cause - Bondy Blog
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MarsL, Lily Luciole, Combo, Marquise… Si ces artistes vous sont inconnu.e.s, leurs œuvres vous sont peut-être plus familières. Qu’elles provoquent le rire, la fascination ou l’étonnement, Feminists of Paris les place toutes sous le même signe : celui du féminisme. Afin que vous puissiez les (re)découvrir, la visite « Street art & féminisme » vous amène dans les rues de la Buttes-aux-cailles, haut-lieu du street art parisien : préparez-vous à voir le féminisme sous un nouvel angle.

14h30, 2 rue Jonas, devant le café chez Gladines. Nous sommes six : deux hommes et quatre femmes, Cécile – la guide – inclue. Le public est presque entièrement blanc, l’autrice de ces lignes est la seule femme racisée, et elle s’inquiète : cette visite sera-t-elle un énième coup des « féministes universalistes » ? Coupant court à ses interrogations, Cécile commence par expliquer le concept de la visite : utilisant les œuvres d’art comme porte d’entrée pour parler de féminisme, le tour se doit d’être interactif. On procède alors à un petit tour de table afin de faire connaissance : après une brève présentation, on doit dire un mot auquel le terme « féminisme » nous fait penser. Au milieu des « égalité », « radical » et autres « liberté », nous optons pour « intersectionnalité ». Les présentations terminées, la visite peut commencer.

Un musée du féminisme à ciel ouvert

Considérée comme la street-artiste féministe française de référence, MissTic est la première artiste présentée. Cécile remet néanmoins en question ce statut élogieux : alors que le féminisme doit être inclusif, les œuvres de MissTic représentent souvent des femmes blanches, jeunes, hétérosexuelles et sexualisées. Ouf de soulagement de notre côté : nous semblons partager la même vision des choses.

Plus le temps passe, plus la visite devient intéressante. Cécile s’exprime toujours clairement, sa voix forte et son élocution mettent en valeur des connaissances solides : on a envie de l’écouter. En ce qui concerne les œuvres, qualité et quantité sont au rendez-vous. On passe des femmes à la beauté normée de MissTic à la femme noire en tenue traditionnelle de Lily Luciole ; de la Blanche-Neige armée d’Alys Cheshire au poster pro-LGBTQI+ de Combo ; des femmes-vulves aux cheveux colorés de Wild wonder woman aux clitoris artistiques de MarsL et ainsi de suite.

Wild wonder woman

Chaque œuvre est utilisée pour lancer une discussion sur un thème particulier. Afroféminisme, écoféminisme, harcèlement de rue, luttes LGBTQI+, masculinité toxique, pop féminisme… tout y passe et tout le monde est invité à donner son avis et/ou partager ses connaissances. La cerise sur le gâteau de cette visite ? L’appréhension des sujets tabous du féminisme : la pornographie, la prostitution, le voile et la radicalité (illustrée par l’exemple des Femens). Alors que ces sujets débouchent presque toujours sur des débats houleux, Cécile évite les altercations en les évoquant de manière très factuelle (ce qui permet aussi d’apprendre plein de choses).

Quand la rue devient un lieu de dialogue entre œuvres, artistes et habitants

Lorsque les œuvres s’y prêtent, notre guide nous parle du quartier qui nous accueille, la Butte-aux-cailles. Pour la petite anecdote, on apprend que le nom du lieu n’a aucun rapport avec les cailles (vous savez, ces petits poulets) mais qu’il vient de Pierre Caille, celui qui a acquis la butte en 1543. On apprend également que nous nous trouvons dans un lieu-phare de la Commune de Paris, d’où les portraits de Louise Michel en punk un peu partout dans les rues. La Butte-aux-cailles est un quartier dont l’histoire s’enrichit grâce aux street-artistes, à leurs œuvres et aux habitants. En effet, la rue y est un lieu d’expression : en fonction de leurs valeurs et de leurs intérêts, les artistes exposent leurs œuvres, et les habitants y répondent à leur manière – c’est l’avantage et parfois l’inconvénient de ne pas exposer dans un « vrai » musée. Ainsi, deux passants ont jugé bon d’ajouter leur touche à une œuvre de Carole B., street-artiste féministe.

Représentant Wonderwoman et affichant la devise « Liberté, égalité, féminité », l’un.e a repassé cette dernière d’un « Vive Zineb El Kharoui » et l’autre a rayé « Féminité » pour le remplacer par « Féminisme ». Si cette modification n’est pas méchante, certaines méritent le terme de dégradation. Vingt pas plus loin, un poster queer friendly de Combo a été l’objet de tags homophobes et islamophobes. Présentant des personnages queer et des street-artistes connus (dont l’auteur de l’œuvre), le terme « P.D » a été inscrit sur la représentation de John Hamon, et le pull de Combo – orné d’un croissant de lune, d’une croix et d’une étoile de David – a vu son croissant de lune rayé.

Poster de Combo

Conscients de ces interventions, les artistes changent et remplacent leurs œuvres très régulièrement. Intra Larue est une artiste qui a parfaitement compris ce qu’exposer dans la rue implique et signifie. Exposant des moulages de ses seins un peu partout dans Paris, elle se les faisait régulièrement voler. Maintenant, elle les moule dans un matériau très friable qui s’effrite dès qu’on le touche. Le message est aussi symbolique que clair : introduire son corps dans l’espace public ne signifie pas qu’on peut se l’approprier sans l’accord de celui ou celle à qui il appartient.

Lieu d’échanges asynchrones ou terrain de guerre froide, la rue donne à l’art une dimension interactive très spontanée qu’on ne trouve nulle part ailleurs. Pourtant, ce système est très représentatif du rapport entre les Français et le féminisme.

Une vulgarisation bienvenue du féminisme

Comme en témoignent plusieurs œuvres, cette relation peut être conflictuelle pour différentes raisons. A la fin de la visite, les participant.e.s se mettent à discuter de l’aspect parfois élitiste du féminisme. On conclut le débat en disant que la visite Street art & féminisme permet justement une vulgarisation du féminisme. La rue étant un espace populaire, utiliser des œuvres de street-art comme porte d’entrée de concepts féministes permet à tout le monde de les comprendre. « Certaines filles font venir leur père, frère, copain etc., et à la fin de la visite ils nous disent qu’ils ne savaient pas qu’ils étaient féministes », affirme Cécile.

Au-delà de la simple découverte, c’est donc aussi dans un but de vulgarisation que la visite a vu le jour. « Avec Julie (cofondatrice de Feminists of Paris, ndlr), on a remarqué que le féminisme est un mouvement qui s’autoalimente beaucoup : les féministes font appel à d’autres féministes pour se réunir et parler de féminisme » explique notre guide. Cette façon de faire étouffe le courant et dessert la cause. Certaines personnes sont laissées de côté alors qu’elles ne devraient pas l’être et, de ce fait, le féminisme ne se renouvelle pas. »

(Re)Naissance, oeuvre de Marquise

Traiter le féminisme de manière ludique, inclusive et décomplexée est donc le pari réussi de Feminists of Paris. Si les féministes ont longtemps lutté à coup de grands mots et théories complexes pour légitimer leurs combats, Feminists of Paris nous montre grâce à l’art que la simplicité ne défavorise pas forcément la lutte – au contraire.

Sylsphée BERTILI

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